JEUNES FRANCO-TURCS: INTEGRATION ET REUSSITE

 

Portrait de:         Anatole_i

Que dire …que dire si ce n’est que je réponds mot pour mot à la définition BBTienne du « jeune turc étudiant » présente sur le site BBT à la rubrique «étrangers par défaut».

Originaire d’une toute petite ville de Province forte d’une importante communauté turque dont tous les membres se connaissent, je débarque à la Faculté de Droit tout fier d’être le premier de ma petite communauté turque à m’asseoir sur les bancs de l’Université.
Une fierté combinée à la Peur de l’échec; les paroles prononcées par mon Père avant ma montée dans le train qui m’emmène vers « la Grande Ville » me glacent le sang : « Oðul, okumayýp beni mars edersen bi daha eve ayak basma ! »
Véritable épée de Damoclès que ces paroles prononcées par un Père dur mais généreux, paysan illettré et à la fois doté d’une sagesse anatolienne extraordinaire.

Me voilà donc sur le Campus, ayant pour seul bagage l’Honneur familial à préserver. C’est à cette époque que je prends conscience de ma double identité. Je n’ai aucun problème avec mes amis « gaulois » à la fac, mais je me rends très vite compte que quelque chose me manque : les visites «surprises» des familles turques, le thé partagé, les interminables conversations sur le football turc et la politique , bref cette ambiance familiale turque qui me paraissait couler de source d’une manière inconsciente et que je ne retrouve plus sur le Campus.
Avec la Peur des exams ma pire ennemie à la fac, c'était cette sensation de solitude ; séparé de la communauté turque, je scrutais les panneaux d'affichages des étudiants pour voir si je trouverais un nom turc...pour m'auto-encourager, me dire que moi aussi je pourrais y arriver...

Dans ce contexte le site et les forums BBT m’ont véritablement aidé, ce fut une révélation pour moi à l'époque ; je n'étais plus seul au milieu de ma Faculté....je devais à tout prie réussir comme tous ces brillants BBTiens à travers l’Hexagone pour trouver ma place au sein de ma Communauté !

J’ai en quelque sorte remplacé ma communauté turque de Province par une communauté turcophile virtuelle.

J’ai aujourd’hui tenu la promesse faite à mon Père. Okudum, Onu mars etmedim. J’exerce en temps que fonctionnaire des fonctions d’encadrement dans ma Ville natale, mon père est fier, moi soulagé de ne pas avoir trahi la confiance parentale.

Le regard des autres parents d’élèves turcs de la commune a changé également. Nombre d’entre eux pensaient que les études éloigneraient définitivement leur progéniture de la culture turque.

Pour eux éducation était synonyme d’assimilation, or dans les faits c’est le contraire qui se produit : la biculture est un formidable cadeau qui si elle est mal appréhendée peut se révéler être un fardeau dur à porter pour les individus culturellement les plus démunis.

Moralité : ils sont de plus en plus nombreux ces jeunes lycéens turcs de ma commune qui viennent me demander conseils sur leur orientation ...et j’avoue que cela ne me déplait pas de jouer les Abi…
A titre d’initiation je leur montre entre autres BBT, le site de deux autres Abi précurseurs, et dans leur regard émerveillé, je ressens les sentiments qu’ils éprouvent à cet instant pour les avoir connus également par le passé: Bende varim, Moi aussi j’y arriverai….

Anatole_i
6 novembre 2006